Une journée particulière avec Yves GODARD, Gloria HUET-GARCIA et Marie-Hélène LECOT

Mardi 28 juin 2016

Temps  agréable, les bancs de la Promenade du Peyrou accueillants,  Marie-Hélène Lecot évoque le Montpellier des siècles passés dans le secteur du Peyrou au plan urbanistique et architectural ainsi que les puissantes familles qui y firent construire des hôtels particuliers. Nous nous dirigeons ensuite vers l’hôtel de Lunas tout proche. Dans la cour de l’Hôtel, puis sur une maquette, nous pouvons suivre les nombreuses modifications, agrandissements,  réalisés par les propriétaires successifs. Au19 ème siècle, l’hôtel est acheté par  la famille Sabatier. Félix Sabatier grand bourgeois, drapier de profession, aménage l’hôtel à la manière des grandes demeures parisiennes. Il fait venir de Paris de somptueux meubles à la mode de l'époque, des lustres imposants, aménage le jardin. Mobilier et  décoration choisis par Félix Sabatier sont inchangés depuis 1845. C’est une plongée dans le passé, un temps retrouvé, très proustien.

 

La visite de l’hôtel de Lunas étant terminée, rendez-vous est donné au restaurant « Le Prose » à la Grande Motte où nous sommes accueillis dans le très verdoyant décor du restaurant, près de la piscine.

 

Après un repas léger, bien adapté à la saison, accompagné de bons vins régionaux,  nous nous dirigeons à pied vers la Mairie. C’est assis sur la bordure d’un espace vert, à l’ombre de grands pins tant prisés par Jean Balladur,  que nous écoutons Marie-Hélène nous raconter l’histoire de la Grande Motte, la gestation du projet, sa philosophie, sa réalisation, les difficultés à surmonter, la symbolique etc. Passionnant !

Origine du projet

Le projet a vu le jour dans les années soixante. C’était les trente Glorieuses, la semaine de quarante heures, c’était l’époque de la 2 Cv, d’un pouvoir d’achat un peu amélioré, de l’augmentation de la durée des congés payés, tous facteurs qui conduisirent à  l’avènement du tourisme de masse.

 

C’est durant cette période que malgré la guerre d’Algérie, l’Etat entreprend de très Grands Travaux dans les domaines les plus divers avec pour objectif, l’intérêt général. Parmi ces Grands Travaux : l’aménagement de la Côte languedocienne. Cet aménagement va reposer sur trois constats : l’absence de stations balnéaires importantes sur cette côte, le désir de capter une partie des flux de touristes venus d’Europe du Nord  traversant le Languedoc-Roussillon sans s’y arrêter, enfin la nécessité de diversifier l’économie régionale beaucoup trop centrée sur la viticulture.

 

Le projet apparaît exceptionnel à bien des égards.

       Conçu dès 1959, le projet d’aménagement du littoral languedocien est gardé secret pour éviter toute spéculation. Et le secret sera bien gardé ! Sous prétexte d’assainissement, de reboisement,  la Compagnie du Bas Rhône, créée en 1955,  procède à de nombreux achats de terres en bordure de la côte : 1200 hectares, soigneusement choisis, sont ainsi achetés dans la plus grande discrétion.

 

    En 1963 est crée la Mission Racine, formée de 17 personnes : fonctionnaires, ingénieurs, architectes. La Mission, sous l’autorité directe du premier ministre Georges Pompidou est chargée de la réalisation. Dès sa création, la mission achète des terrains dont le prix est fixé par l’Etat et exerce son droit de préemption sur tout le littoral. Des sommes considérables sont débloquées. L’Etat prend en charge la création de toutes les infra structures, les collectivités groupées au sein de sociétés d’économie mixte s’occupent de la viabilisation et des travaux d’équipements publics, les promoteurs privés des logements et des installations sportives.

 

        Pour la création de la Grande-Motte, les concepteurs entendent avoir la mainmise totale sur le projet et la plus grande liberté d’action. Le projet est gigantesque, il s’agit de créer une ville ex nihilo en un lieu plat, quasi désertique dans lequel pullulent les moustiques, de surcroit  balayé par des vents violents. Ils n’hésitent pas à désigner comme architecte en chef un jeune architecte qui a peu de réalisations à son actif mais fait montre d’une créativité sans pareil et d’un grand don de persuasion : Jean Balladur va tout particulièrement s’investir dans la réalisation de cette ville nouvelle dédiée aux vacances. Désormais, tout, depuis la conception d’ensemble, l’architecture des immeubles,  jusqu’à la couleur des stores ou le mobilier urbain, tout doit avoir son aval.

L’architecte Jean Balladur expliquant, sur une maquette, son projet au général De Gaulle

Ce projet est sous-tendu par un profond humanisme : il s’agit d’apporter à tous les vacanciers un total dépaysement, leur faire oublier, pour un temps, leur quotidien. De ce point de vue tout est à inventer : Jean Balladur entend réaliser une ville-parc dont le modèle n’existe nulle part ailleurs, créer une symbiose entre  bâti et  couvert végétal. L’artisan des plantations sera le paysagiste Pierre Pillet. La réussite est totale, les pins pignons vont magnifiquement se développer dans la ville. L’architecture des  immeubles doit être innovante : la forme  pyramidale, en raison de ses avantages sera privilégiée. Le béton permet toutes les audaces. Tout doit être conçu pour le dépaysement, le loisir, la détente, le sport.

La visite du quartier du Levant

Après l’exposé, nous nous rendons sur la place des trois pouvoirs : le pouvoir politique avec la mairie dont l’agencement met symboliquement en évidence le pouvoir des administrés ; l’église, symboliquement formée de parois paraboliques, vivement éclairée par les vitraux de Jacques Loire et enfin le centre culturel dédié à la Fête.

Tout au long du trajet qui nous conduit à l’hôtel Mercure, Marie-Hélène nous parle des choix architecturaux, de la forme pyramidale, des bâtiments plans et des bâtiments aux formes courbes, de modénatures etc.

 

Sympathique pause sur la Terrasse du Mercure où trois grandes tables rondes et un buffet ont été dressés pour nous.

 

Nous terminons la visite du quartier du Levant par la Grande Pyramide, le Palais des Congrès, et le pont Saint-Jean d’où l’on comprend bien le système de circulation voulu par Jean Balladur.

 

Il y aurait encore beaucoup à dire, je vous renvoie au remarquable document internet :

      « Jean Balladur et la Grande-Motte, l’architecte d’une ville »

 Texte : Michèle François. DRAC Languedoc Roussillon.