LES FORETS DE L'HERAULT

Conférence de Jean Louis ROQUE le Jeudi 12 Mai 2011

Les forêts de l’Hérault, une longue histoire

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Des glaciations à l’Ancien Régime.

Jusqu’au Néolithique, la couverture forestière de l’Hérault est, comme ailleurs, déterminée par la nature et le climat. Après les forêts tropicales du tertiaire, la succession des 24 phases glaciaires et interglaciaires du quaternaire se traduit par des successions de formations steppiques puis par des forêts d’arbres à feuillage caduc. Nos ancêtres sont alors des « chasseurs cueilleurs » qui vivent en totale intelligence avec la forêt, se contentant d’y prélever leur nourriture, ils se comportent en prédateurs nomades et prélèvent peu sur la flore.

 

A partir du Néolithique (7 000 ans avant J.C) l’homme devient le facteur écologique dominant, il s’agit des « pasteurs agriculteurs ». Désormais le paysage sera la conséquence des activités humaines et de la démographie.

 

Les Grecs apportent la culture de la vigne et celle des oliviers, ainsi que les échanges commerciaux sur le pourtour méditerranéen. Par contre les Romains investissent totalement le territoire, la déforestation s’accroît car la population augmente, l’agriculture, le pastoralisme, l’exploitation des bois, l’érosion se s’intensifient, l’exploitation des minerais bat son plein. L’occupant romain fait reculer la forêt « hostile » pour sécuriser le réseau routier. Les premiers gardes forestiers apparaissent : les « saltuarii ».

 

Au Moyen Age, vers l’an mil, le climat se réchauffe, la culture du châtaignier se développe, le hêtre disparaît des zones basses.

Pendant les périodes de paix, la population augmente encore, l’agriculture se développe, on défriche. La forêt régresse. Pour tenter d’y remédier une administration royale des Eaux et Forêts est créée sous Philippe le Bel, son action est encadrée par des Ordonnances royales.

Pendant les périodes de guerre et d’épidémies au contraire la population décroît tandis que la forêt regagne un peu de terrain.

 

L’Ancien Régime.

Comme au Moyen Age, les forêts sont un espace nourricier, source de matériaux et de combustible, très fréquentées, précieuses pour l’économie locale, mais menacées par l’augmentation des besoins. La législation forestière tente d’encadrer leur usage, avec notamment l’Ordonnance de 1669 de Louis XIV. Mais l’administration royale rencontre parfois de fortes oppositions : dans l’Hérault le maître particulier et un garde des Eaux et Forêts de Saint-Pons sont assassinés dans le consulat d’Anglès en 1675....

 

Tout au long du XVIIIème siècle, la disette de bois menace, diverses mesures sont prises pour tenter d’aménager la ressource : éloignement des verreries, utilisation du charbon de terre, interdiction du pacage des chèvres, interdictions de défricher, extension des boisements sur des terres agricoles.

Mais les besoins en terrains de parcours continuent de s’accroître par suite du développement de l’élevage ovin alimentant l’industrie textile.

La disette de bois s’amplifie sous la période révolutionnaire, laquelle supprime les maîtrises royales en 1791. Il faut attendre 1801 pour que Bonaparte crée l’Administration des forêts, et dans l’Hérault nomme les premiers Conservateur à Montpellier et Inspecteur à Béziers.

 

Le XIXème siècle.

Au début du siècle le taux de boisement du département est inférieur à 10%, il s’agit principalement de peuplements feuillus.

La suite du siècle va permettre un renouveau. Le chemin de fer, la machine à vapeur et les bateaux à coque métallique débouchent sur des importations de peaux et de laines de pays exotiques. La pression sur les forêts diminue. Le développement de la viticulture et la révolution industrielle provoquent un exode rural qui libère des terres.

Dans le cadre d’un vaste programme de lutte contre les inondations, L’Etat impulse une politique de reboisement volontaire à laquelle adhèrent certains propriétaires privés, mais c’est insuffisant pour traiter le problème. A partir de 1860 l’Etat intervient en achetant les terrains dans des périmètres de Restauration des Terrains en Montagne (« RTM »), et en reboisant lui-même. Le forestier devient technicien avec la création d’écoles forestières et le développement de la recherche. Le Code forestier est promulgué en 1827.

 

F.D. de N.D.de Parlatges -Fin du 19ème siècle

Le XXème siècle.

En 1908, la surface boisée de l’Hérault est de 85.000 ha, en 2006 elle atteint 208 000 ha ...

En effet le reboisement des périmètres « RTM » perdure et permet de constituer quatorze des forêts domaniales actuelles.

 

F.D. de N.D. de Parlatges, après reboisement « RTM » (2010)

Le financement des reboisements se diversifie : Etat, Département, Produit des Jeux, Commission départementale du reboisement, Association forestière de l’Hérault, Chantiers de chômage, Chantiers de jeunesse, Fonds forestier national, Chantiers ex-harkis, reconstitution de la forêt méditerranéenne, programmes intégrés méditerranéens financés par l’Europe …

S’y ajoute l’extension naturelle des boisements sur certains terrains non pâturés, non exploités, non incendiés durant de longues périodes.

Corrélativement les attentes de la société vis-à-vis des espaces forestiers se diversifient .La gestion forestière s’élargit à la protection des milieux et des espèces et à l’ensemble des éléments de l’écosystème forestier.

Les premières réserves naturelles sont créées et animées par le Conservateur Max Nègre, dès 1933, puis par Jean Prioton .

La réintroduction des grands animaux en forêt est entamée en 1956, en collaboration avec la Fédération des chasseurs (mouflons, cerfs, chevreuils), tandis que les sangliers profitent de l’extension naturelle du chêne vert.

 

La seconde partie du XXème siècle voit se développer la prévention contre les incendies : on équipe le terrain, adapte les sylvicultures. Le département accroît remarquablement ses interventions : depuis 1966, les sapeurs pompiers sont formés, équipés et organisés dans ce but, en 1976 sont créées les unités de forestiers sapeurs, en 1999 les équipes d’auxiliaires de protection de la forêt méditerranéenne. La puissance publique impose le débroussaillement autour des constructions et voiries et met en place des plans de prévention en vue de maîtriser l’urbanisation.

 

Nos forêts à la fin du XXème siècle.

Désormais, le tiers du département est couvert de formations forestières très diverses avec plus de 90 espèces. La surface boisée est d’environ 200.000 ha, les 3/4 feuillus (le chêne vert est majoritaire) 1/4 résineux. Ce sont des bois privés à 80%.

L’Office National des Forêts gère à lui seul 52000 ha appartenant aux propriétaires publics : l’Etat pour 30.000ha (soit les 16 forêts domaniales), les collectivités pour 22.000ha (dont les 131 forêts communales).

La Direction départementale de l’Agriculture et le Service régional d’ ’Aménagement forestier sont chargés des missions régaliennes du ministère, l’Inventaire forestier national mesure l’étendue et la composition de toutes les forêts, le Centre régional de la propriété forestière, le syndicat des propriétaires forestiers sylviculteurs et le centre d’études techniques et d’expérimentations forestières animent et conseillent les propriétaires privés.

 

Sylvopastoralisme en F.D. de la Séranne
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F.D. du Somail-Lac du Bourdelet
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Village et F.D. de St Guilhem
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